Prédication du 1er novembre 2020

Prédication du 1er novembre 2020

Prédication du 1er novembre 2020

Relisez la prédication d’Ernest Nussbaumer, du 1er novembre :

Prédication du 1er novembre 2020

Culte en visio du dimanche 1er novembre 2020 paroisse LRG

 

Evangile de Mathieu 5 : 1 à 12

 

1 Jésus voit les foules qui sont venues. Il monte sur la montagne, il s’assoit et ses disciples viennent auprès de lui. 

2 Jésus prend la parole et il les enseigne en disant :

 3 « Ils sont heureux, ceux qui ont un cœur de pauvre, parce que le Royaume des cieux est à eux.

4 Ils sont heureux, ceux qui pleurent, parce que Dieu les consolera

5 Ils sont heureux, ceux qui sont doux, parce qu’ils recevront la terre comme un don de Dieu

6 Ils sont heureux, ceux qui ont faim et soif d’obéir à Dieu, parce qu’ils seront satisfaits

7 Ils sont heureux, ceux qui sont bons pour les autres, parce que Dieu sera bon pour eux

8 Ils sont heureux, ceux qui ont le cœur pur, parce qu’ils verront Dieu

9 Ils sont heureux, ceux qui font la paix autour d’eux, parce que Dieu les appellera ses fils

10 Ils sont heureux, ceux qu’on fait souffrir parce qu’ils obéissent à Dieu. Oui, le Royaume des cieux est à eux

11 Vous êtes heureux quand on vous insulte, quand on vous fait souffrir, quand on dit contre vous toutes sortes de mauvaises paroles et de mensonges à cause de moi

12 Soyez dans la joie, soyez heureux, parce que Dieu vous prépare une grande récompense En effet, c’est ainsi qu’on a fait souffrir les prophètes qui ont vécu avant vous

 

01/11/2020 Psaume 1- Psaume 23- Mathieu 5, 1-12

Prédication de Ernest NUSSBAUMER

Aujourd’hui c’est la Toussaint. Une fête que nos frères catholiques ont instituée il y a environ 1300 ans pour honorer la foule innombrable de ceux et celles qui ne sont plus parmi nous mais ont été de vivants et lumineux témoins du Christ, fidèle à l’évangile et au service de tous. Nos frères catholiques ont officiellement reconnu et donnés en modèle certains d’entre eux : les saints. Vous savez sans doute que ce n’est pas la pratique chez les protestants mais ensemble catholiques et protestants rappellent que tous les hommes sont appelés à la sainteté, par des chemins différents, parfois surprenants ou inattendus, mais tous accessibles. La sainteté n’est pas une voie réservée à une élite : elle concerne tous ceux et celles qui choisissent de mettre leurs pas dans ceux du Christ.

 

Se Souvenir et s’interroger, goûter déjà à la joie de ceux qui ont mis le Christ au centre de leur vie et vivre dans l’espérance de la Résurrection c’est  le sens originel de la fête de la Toussaint .

Et le texte de l’Evangile de Matthieu qui nous est donné pour ce jour à tout pour nous surprendre. Il proclame notre bonheur précisément dans des situations où nous identifions et expérimentons le malheur.  Selon l’évangéliste Mathieu c’est la première parole solennelle de Jésus, le commencement de son enseignement.

Et, comme souvent dans la Bible, ce qui commence une nouvelle étape, ici l’enseignement de Jésus, entretient des rapports avec le Commencement, c’est-à-dire le début de la Genèse où le serpent a dit à Adam et Ève qu’ils pouvaient tout voir, tout avoir, tout savoir, tout de suite, sans passer par Dieu, sans le fréquenter longuement : c’était un mensonge et cela a conduit Adam et Eve dans le malheur. La parole de Jésus qu’il nous est donné de méditer de réfléchir ce matin racontent comment les descendants d’Adam et d’Eve que nous sommes peuvent vivre vraiment, quand ils acceptent de résister à la logique du serpent : je n’ai pas tout, la vie m’échappe -“ils sont heureux les pauvres, ils sont heureux ceux qui pleurent ” : mais bien loin de prendre sur le dos des autres ce qui semble me manquer, je suis invité à prendre la mesure et la signification pour moi de la déclaration de bonheur que proclame Jésus.

Nous sommes donc ce jour de la Toussaint dans notre texte face à une dizaine de déclarations de bonheur qui ne font pas leur chemin tout seul dans nos têtes dans nos cœurs.

 

Une première question se pose alors que Jésus commence son sermon par « Ils sont heureux » Sommes-nous heureux aujourd’hui ? ou bien comment peut-on être heureux aujourd’hui devant la succession des catastrophes qui frappe les humains, l’une chassant l’autre dans notre esprit ? Quand tant de nos frères et sœurs humains sont dans la souffrance de la faim, de la guerre, des injustices ? Oui, comment être heureux aujourd’hui ? face aux menaces des changements de toutes sortes dans notre environnement, face à tous les dangers sur notre nourriture et donc notre santé Et maintenant ces attentats à répétition et cette pandémie du Covid qui s’est déclarée subitement

Ensuite, « Heureux », cela a à voir avec bonheur. Mais à quoi ressemble le bonheur ? Existe-t-il ?? Aujourd’hui, il y a une certaine forme de course au bonheur qui se vit comme un impératif, comme un devoir de bonheur : il faut être heureux à tout prix ! Santé parfaite, jeunesse prolongée, beauté achetée à grands frais, sexe à volonté, accumulation de richesses, spiritualités séduisantes … mais tout cela contribue-t-il vraiment au bonheur ? On ne le dirait pas en regardant les visages de ceux que nous croisons Cette quête épuisante n’est-elle pas vaine, source de frustrations et d’un toujours plus qui finalement n’engendre que des insatisfactions ?

Dans le psaume 23, David témoigne que « le bonheur et la grâce m’accompagnent tous les jours de ma vie » (Ps. 23) Ça parait impossible. Le bonheur. Absolument chaque jour ?

David ne nous promet pas le bonheur, il ne nous dit pas : faites ceci et vous aurez le bonheur. Il ne nous dit pas non plus : c’est dans la vie future que vous connaîtrez le bonheur. Non, David témoigne de son bonheur, d’un bonheur présent comme de quelque chose de tout simple qui l’accompagne dans les bons jours, mais aussi dans les jours terriblement tristes. Et David en a connu, des jours sombres, il les évoque à travers cette image de la vallée d’ombre et de mort, ces jours où son fils meurt par sa faute, jours où il est poursuivi par la jalousie de son roi… et les jours terribles de honte après les crimes qu’il a commis…

Mais quel est donc ce bonheur dont nous parle David ? Ce n’est pas un bonheur que l’on a, que l’on possède, mais un bonheur qui nous accompagne.

Heureux c’est aussi le premier mot du livre des psaumes. Mais l’origine hébraïque de Heureux est le verbe ashereï. qui dit à la fois le fait d’être heureux et d’être en marche, d’avancer. Cela permet déjà de comprendre comment le bonheur peut être vécu dans l’abondance comme dans des situations difficiles. Quand tout va bien et que l’on en profite pour avancer, il y a un vrai bonheur. Et de la même façon, quand on a des ennuis et que l’on arrive à avancer un peu : quand les larmes sont un peu consolées, quand la paix progresse, quand le deuil devient plus serein, quand la maladie perd du terrain… Le bonheur est là, dans cette dynamique qui consiste à avancer, à progresser, à surmonter, mais encore quand on a pu aider quelqu’un à avancer. Oui, c’est bon et cela fait du bien.

Mais ce n’est pas le seul mot en hébreux pour dire le bonheur, il y en a un autre, sinon notre notion du bonheur risquerait de tourner à la course effrénée. Ce second mot pour dire le bonheur, c’est tout simplement tov, « ce qui est bon ». Le bonheur, c’est ce qui est bon.

Il y a du bonheur dans le fait d’avancer, c’est vrai, mais il existe un autre bonheur, celui du repos, au sens du Shabbat biblique, ce jour où l’on arrête pour vivre et être heureux sans rien ne produire ni se déplacer. Dieu, nous dit la Genèse, a choisi de se reposer le 7e jour après avoir créé pendant 6 jours. À la fin de chacune de ces 6 journées consacrées à créer la terre et tout ce qu’elle contient, le récit nous dit que Dieu regarde et se réjouit de ce qui est bon. Lui aussi affiche alors son bonheur. Mais à l’aube du 7e jour, Dieu s’arrête complètement et il dit c’est « très bon »

Il y a ainsi le bonheur d’avancer et il y a le bonheur d’être là, de s’arrêter pour voir ce qui existe de bon, et de le bénir. Il n’y a pas que du bon à voir, évidemment, mais le bon existe et le propre de cet amour qu’est Dieu c’est de se réjouir de cette bonne part.

Ce bonheur de la contemplation, c’est aussi, comme dans le Psaume 1er, un temps où l’on se laisse créer par Dieu. Comme un arbre enraciné près d’un cours d’eau grandit et pourra produire des fruits en son temps. Et c’est aussi l’occasion de se laisser purifier par Dieu, comme le dit ce psaume avec l’image du vent qui fait s’envoler la paille et garde le bon grain.

Voilà donc le bonheur, selon la bible, c’est d’avancer et de se réjouir de ce qui est bon. Et si nous existons aujourd’hui, c’est bien que nous avons reçu cette double grâce, cette double qualité de bonheur : avancer et contempler.

Je vous propose de suivre le fil du texte de Mathieu.

 

La première déclaration est au présent « Ils sont heureux, ceux qui ont un cœur de pauvre, parce que le Royaume des cieux est à eux ». Et c’est aussi le cas de la huitième déclaration « Ils sont heureux, ceux qu’on fait souffrir parce qu’ils obéissent à Dieu. Oui, le Royaume des cieux est à eux. »

 

 

Arrêtons-nous un instant sur cette expression du Royaume des cieux qui, déclare Jésus, « est à ceux qui ont un cœur de pauvre ». Un royaume est un espace de règne, de lois, de commandements et de respect. Dans un royaume, il y a forcément un roi qui exerce sa volonté et son autorité. Tout son peuple lui doit obéissance et honneur. S’il est nécessaire de préciser qu’il y a le Royaume des Cieux, c’est qu’il y a un autre royaume qui s’est établi sur cette Terre et a amené avec lui toute sortes de malheurs et d’injustices et toute l’humanité en souffre. Cette situation sur terre est exactement ce qui est contraire à la volonté de Dieu. C’est pourquoi, Le Royaume des Cieux et Sa justice apportent la consolation et sont la bonté, la délivrance, la paix, la joie, la guérison, l’accomplissement des promesses, le pardon des péchés, la justification, et la vraie justice qui vient de Dieu pour toute la Terre entière. Il s’agit en somme des choses qui viennent d’en Haut.

 

Jésus le déclare à tous ceux qui ont un cœur de pauvre ou bien qu’on fait souffrir parce qu’ils obéissent à Dieu. : Oui, le Royaume des cieux est à eux déjà maintenant !!!. Sont heureux ceux que Jésus déclare heureux. Sans doute, pour l’instant, ils demeurent ce qu’ils sont : pauvres, et dans la souffrance. Le bonheur annoncé n’attend pas que la situation actuelle ait été corrigée ; il est déjà là, se tient dans la parole de Jésus et se manifeste malgré les oppositions, dans la relation d’amour qui est donné par Jésus à tous les pauvres de cœur et tous les persécutés.

 

Les trois déclarations suivantes s’adressent à des personnes qui vivent manifestement un manque « ceux qui pleurent, ceux qui sont doux, ceux qui ont faim et soif de justice. Et les déclarations de Jésus sont pour ces personnes au futur « Dieu les consolera, ils recevront la terre comme un don de Dieu, ils seront satisfaits » Elles ouvrent aux personnes qui sont dans ces situations un avenir, une espérance. Tout n’est pas donné tout de suite mais tout est annoncé.

 

Les quatre béatitudes suivantes sont elles aussi dans la thématique de la justice, mais cette fois elles contiennent une exigence, elles sont déclarées comme la conséquence d’un mouvement, d’une implication de la part du croyant : « être bon pour les autres, être pur de cœur, faire la paix, être persécuté à cause du combat pour la justice ». Sous différentes facettes, on peut dire qu’elles déclarent heureux ceux et celles pour qui la justice, celle du royaume des cieux est un enjeu majeur. Si les prophètes dans l’ancien testament dénonçaient ceux qui pratiquaient l’injustice, Jésus déclare heureux ceux qui placent au centre de leur vie le souci de la justice.

Dans cette perspective, il faut noter enfin que Jésus parle très concrètement : du cœur, des larmes, d’avoir faim et soif de justice, des souffrances. Le paradoxe par lequel Jésus déclare heureux ceux et celles qui ne se pensaient pas tels, mais qui sont concernés par la justice, touche au plus intime de notre être. Et cela a  à voir avec la relation à Dieu : voir Dieu -être appelé fils de Dieu dans les six et septièmes déclarations. En faisant confiance aux déclarations des béatitudes, à la suite de Jésus qui nous ouvre ce chemin, ce qui nous est promis c’est la joie et l’allégresse d’une relation filiale avec Dieu.

Le bonheur, le ” être heureux “, est envisagé ici comme l’opposé de la fatalité, du découragement, comme le contraire d’un triste sort. C’est une vitalité, une invitation, un appel qui mobilise l’existence toute entière, qui ne cesse d’être adressé au croyant quels que soient les difficultés de sa vie. Autrement dit, cette déclaration de Jésus ne présente pas un mode d’emploi du bonheur, mais invite le croyant à placer sa confiance en Dieu en répondant ” oui ” à son appel à vivre.

Dans ce monde rempli de mal, de méchanceté, de douleur, de tristesse, notre texte rappelle aux disciples du Christ ce qu’ils sont et ce qu’il leur est demandé d’être. Ils sont enfants de Dieu, pardonnés en Jésus-Christ, membres du Royaume des cieux, héritiers de la nouvelle terre à venir, bénéficières de l’amour, de la justice, de la consolation, de la bonté et de la paix de Dieu. Et c’est au milieu des malheurs de ce monde, au milieu des souffrances et des peurs qui nous entourent et que peut-être nous vivons personnellement, que les disciples du Christ sont appelés, à être ceux qui apportent le message de la justice de Dieu, qui témoignent de son amour, transmettent sa bonté, apportent sa consolation et travaillent à faire grandir sa paix.

 

 

 

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