Prédication du 14 mars 2021 – Andrea Vestrucci

Prédication du 14 mars 2021 – Andrea Vestrucci

Prédication du 14 mars 2021 – Andrea Vestrucci

Écoute de la Parole de Dieu Prière d’Illumination Andrea Vestrucci

Predication 14 Mars 2021 Andrea

Autant le ciel est élevé au-dessus de la terre, autant les voies du Seigneur sont élevées au-dessus de nos voies et ses pensées au-dessus de nos pensées.

Comme la pluie et la neige descendent du ciel et n’y reviennent pas
sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et fait germer, sans avoir donné de la semence au semeur et du pain à celui qui a faim, ainsi en est-il de la parole qui sort de la bouche du Seigneur: elle ne revient pas à Dieu sans effet, sans avoir fait ce que Dieu désire, sans avoir réaliséce pour quoi Dieu l’a envoyée.

Hebr 4 : 12-13.

Car la parole de Dieu est vivante, agissante, plus acérée qu’aucune épée à deux tranchants; elle pénètre jusqu’à diviser l’âme de l’esprit, et les jointures des moelles; elle est juge des sentiments et des pensées du cœur.

Il n’est pas de création qui échappe à son regard: tout est mis à nu et offert aux yeux de celui à qui nous devons rendre compte.

Nb 21 : 4-9

Lectures Bibliques – Dimanche 14 Mars 2021

Ils [les israélites] quittèrent Hor-la-Montagne par la route de la mer des Roseaux en contournant le pays d’Édom. Mais en chemin, le peuple perdit courage.
Il récrimina contre Dieu et contre Moïse : « Pourquoi nous avoir fait monter d’Égypte ? Était-ce pour nous faire mourir dans le désert, où il n’y a ni pain ni eau ? Nous sommes dégoûtés de cette nourriture misérable ! »

Alors le Seigneur envoya contre le peuple des serpents à la morsure brûlante, et beaucoup en moururent dans le peuple d’Israël.
Le peuple vint vers Moïse et dit : « Nous avons péché, en récriminant contre le Seigneur et contre toi. Intercède auprès du Seigneur pour qu’il éloigne de nous les serpents. » Moïse intercéda pour le peuple, et le Seigneur dit à Moïse : « Fais-toi un serpent brûlant, et dresse-le au sommet d’un mât : tous ceux qui auront été mordus, qu’ils le regardent, alors ils vivront ! »

Moïse fit un serpent de bronze et le dressa au sommet

Jn 3 : 14-21

En ce temps-là, Jésus disait à Nicodème : « De

homme était mordu par un serpent, et qu’il regardait vers le serpent de

du mât. Quand au bronze, il restait en vie !

même que le serpent de bronze

fut élevé par Moïse dans le désert,

ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé,

afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle.

Car Dieu a tellement aimé le monde

qu’il a donné son Fils unique,

afin que quiconque croit en lui ne se perde pas,

mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde,

non pas pour juger le monde,

mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.

Celui qui croit en lui échappe au Jugement,

celui qui ne croit pas est déjà jugé,

du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.

Et le Jugement, le voici :

la lumière est venue dans le monde,

et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière,

parce que leurs œuvres étaient mauvaises.

Celui qui fait le mal déteste la lumière :

il ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dénoncées ; mais celui qui fait la vérité vient à la lumière  que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu pour qu’il soit manifeste.

 

Texte de la Prédication – Dimanche 14 Mars 2021, Laetare Andrea Vestrucci

Sœurs et frères,

Les textes d’aujourd’hui nous invitent à réfléchir sur un des éléments centraux de notre foi, de notre identité chrétienne. C’est le mystère du salut octroyé par Dieu à travers le don du Fils de Dieu.

De cette manière, les textes d’aujourd’hui nous introduisent aux célébrations de Pâques. Pâques est le moment sublime et suprême de toute l’année liturgique. Donc, Pâques est aussi le moment le plus complexe, le plus profond, de toute l’année. Il est important de nous préparer aux célébrations de Pâques : cette préparation nous aide à bien discerner la richesse et complexité de Pâques.

Sans préparation, on risque d’arriver à Pâques et de ne pas vraiment saisir ce qui se passe : on participe à une grande célébration, on est transporté par l’allégresse de l’assemblé, mais parfois on sort en se disant : « Qu’est-ce qui s’est passé vraiment ? ». Les textes d’aujourd’hui nous aident à mieux discerner ce qui se passe à Pâques. Ils sont une sorte de mini-conférence de Carême – et prononcée par le directe intéressé, Jésus Christ !

Le texte de Jean nous présente une conversation nocturne entre Jésus et Nicodème, un pharisien et chef juif. Nicodème rend visite à Jésus après la célèbre expulsion des marchands du Temple de Jérusalem pendant la Pessah [Jn 2:13-25], la célébration de l’Exode d’Égypte. Tout ce dialogue nocturne est célèbre. On y trouve le passage sur la deuxième naissance par l’eau et l’esprit, et l’autre passage sur le vent qui souffle où il veut. Cette conversation doit avoir vraiment marqué Nicodème, car on le retrouve prendre la défense de Jésus auprès du Sanhedrin – le tribunal suprême d’Israël – en rappelant aux juges qu’avant de condamner quelqu’un il faut l’écouter [Jn 7:45-51]. Enfin, on le retrouve à la mise au tombeau de Jésus :

Nicodème aide Joseph d’Arimathie en apportant une grande quantité de myrrhe et d’aloé pour embaumer le corps de Jésus [Jn 19:39-42].

On voit que la figure de Nicodème est intimement liée aux célébrations de Pâques. Et, donc, aussi la conversation entre Jésus et Nicodème que Thérèse vient de nous lire est une référence constante à Pâques.

Le texte de Jean commence par mentionner un événement lié à Moise – un des protagonistes centraux de la Pessah. Les israélites sont dans le désert, ils sont découragés et se plaignent. Dieu s’énerve et envoie des serpents, avec des conséquences funestes. Cela nous rappelle les mots de Dieu au serpent dans Gn 3:15 : « Je mettrai de l’hostilité entre toi [le serpent] et la femme, entre ta descendance et sa descendance: celle-ci t’écrasera la tête, et tu lui mordras le talon. » Les israélites culpabilisent et demandent à Moise d’intercéder auprès de Dieu. Dieu dit à Moise de monter un serpent brulant sur le sommet d’un bâton. Moise fait un serpent de bronze et le met sur un bâton. Ceux qui sont mordus par un serpent restent en vie s’ils voient le serpent de bronze.

Ce serpent de bronze sera ensuite l’objet d’une dispute … théologique : dans 2 Rois 18:4 le roi Hezekiah commande de détruire ce serpent de bronze [Nehushtan] pour éviter un culte idolâtre. Je ne peux pas approfondir les liens avec les cultes du serpent dans les autres régions de la Méditerranée, en particulier à Canaan et en Grèce – cultes dont l’imaginaire est arrivé jusqu’à nos jours [bâton d’Asclépios]. Car ce qui nous intéresse est l’analogie entre ce serpent de bronze et le Fils de Dieu.

Une analogie signifie simultanément identité et différence.

Identité : les deux textes d’aujourd’hui parlent d’avoir la vie sauvée. Mais dans l’épisode de Moise, c’est la vie terrestre ; dans la conversation entre Jésus et Nicodème il s’agit de la vie éternelle.

Identité : Dans les deux tests on parle d’un moyen pour avoir la vie sauvée. Mais d’un côté le moyen est de regarder le serpent de bronze (pour la vie terrestre). De l’autre côté le moyen est de croire au Fils de Dieu (pour la vie éternelle).

Identité : dans les deux textes on parle d’élévation. Mais d’un côté nous avons Moise qui met le serpent de bronze sur le sommet d’un bâton. De l’autre côté nous avons Dieu qui donne son Fils au monde pour qu’il soit élevé. Et on sait bien en quoi cette élévation consiste : c’est l’élévation à la Croix. C’est le sacrifice du Fils de Dieu.

Ce sacrifice du Fils de Dieu est unique, extraordinaire, paradoxal : il ne s’agit pas d’un sacrifice qu’un être humain fait pour Dieu. C’est exactement l’opposé : c’est un sacrifice que Dieu fait pour les êtres humains. L’ordre est donc renversé : non pas l’être humain qui tend vers Dieu, mais Dieu qui tend vers les êtres humains – mieux, vers le monde entier ! – à travers l’élévation de son Fils, c’est-à-dire, à travers le sacrifice de son Fils.

Ce sacrifice est donc paradoxal car il est un sacrifice divin. Et il est un sacrifice divin car il est paradoxal. En d’autres termes, ce sacrifice divin est un mystère.

Et il est un mystère pour trois raisons. D’abord, car c’est Dieu qui le fait. C’est Dieu qui veut accomplir – et qui accomplit – ce sacrifice. Et cela est chose dont nous, êtres humains, n’avons pas expérience. Nous avons expérience de qu’est-ce qu’un sacrifice fait par nous. Mais on ne peut pas avoir expérience de qu’est-ce qu’un sacrifice fait par Dieu. On peut seulement essayer d’imaginer une volonté divine qui décide de sacrifier son trésor, son Fils bienaimé, pour l’humanité.

L’autre raison pour laquelle ce sacrifice divin est un mystère concerne l’objet de ce sacrifice : le Fils de Dieu, Jésus Christ. Encore une fois, nous n’avons pas l’expérience de qu’est-ce qu’un être à la fois pleinement homme et pleinement Dieu. Nous n’avons pas l’expérience d’une intelligence sans péché et d’un cœur sans péché. On peut seulement essayer d’imaginer cet être, cette intelligence, sur la base des analogies entre lui et nous, en nous

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imaginant à sa place dans les stations de sa vie –y compris les stations du Chemin de Croix.

Dernière raison pour laquelle ce sacrifice divin est un mystère : le but de ce sacrifice. Jésus le dit à Nicodème : ce but est le salut de l’humanité. Et Jean est très explicite sur en quoi consiste ce salut : ce salut consiste dans la vie éternelle. Qu’est-ce que la vie éternelle ? Encore une fois, on n’a pas expérience de quoi une vie éternelle pourrait être. On peut seulement essayer d’imaginer – et encore … vraiment peut-on imaginer qu’est-ce qu’une vie éternelle? Il me semble que cela va bien au-delà de nos pouvoirs d’imagination.

Nous, avec Nicodème, sommes donc introduit au mystère divin du sacrifice du Fils de Dieu – et nous y sommes introduits par les mots de ce Fils, les mots de Jésus ! Mystère est différent de secret. Un secret est quelque chose qu’on connait mais qu’on ne peut pas dire. Un mystère est quelque chose sur laquelle on ne peut rien dire, car il surmonte les limites de notre intelligence, et, donc, est au-delà des limites de notre langage. Nous, et Nicodème avec nous, nous pouvons uniquement recevoir les mots de Jésus – sans vraiment pouvoir comprendre complètement leur sens.

Mais cela ne doit pas nous empêcher de demander ce qu’est-que ce mystère. Il faut demander, même en sachant qu’aucune réponse ne sera jamais suffisante, car demander permet de prendre mieux conscience de notre identité de chrétien, et d’approfondir notre relation avec la révélation divine.

Je commence donc par le mystère de la vie éternelle. La vie éternelle est ce qui est octroyé par Dieu aux êtres humains grâce au sacrifice du Fils de Dieu. Ce sacrifice on le connait : c’est la crucifixion. Dans les Évangiles, et en particulier chez Jean, Jésus est conscient que son chemin messianique le portera à mourir. Encore plus : Jésus est conscient que ce chemin le portera à être sacrifié. L’identification de Jésus comme Agneau de Dieu est très présente chez Jean – et il revient dans l’Apocalypse, un texte peut-être trop peu lu. Donc, le sacrifice de Jésus commence avec sa mission messianique – et la preuve de cela est le mot que Jésus prononce sur la Croix (chez Jean) « tetélestai » [Jn 19:30] « il est consommé » « il est accompli ». C’est le sacrifice à être accompli et consommé. Jésus dit que son propre sacrifice est accompli, et, avec cela, sa propre mission messianique.

Mais ce sacrifice ne serait pas vraiment divin s’il terminait simplement avec la mort de l’Agneau de Dieu, car dans ce cas il n’y aurait aucune différence entre un sacrifice humain et un sacrifice divin. Le sacrifice divin est non seulement l’élévation de l’Agneau sur la Croix. Le sacrifice divin est aussi l’élévation de l’Agneau du tombeau. Élévation, être debout : c’est larésurrection de la mort. Voilà donc la vie éternelle qui est octroyée par le sacrifice : c’est la vie de la résurrection et dans la résurrection.

Cette vie éternelle est donc la vie libérée – libérée des chaines de la mort. Cette vie éternelle est la vie sauvée de ses propres contraintes, de sa propre condition. Mais qu’est-ce que cela signifie vraiment ? Cela signifie que la vie éternelle est une vie qui n’agit plus par elle-même, qui ne suit plus sa propre volonté. La vie éternelle est une vie qui agit dans Dieu, dans la volonté divine.

C’est bien ce que Jean dit à la fin de la deuxième partie du passage : « celui qui fait la vérité vient à la lumière [lumière du Fils de Dieu – Jn 1:9], pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu. » La traduction dit : « ses œuvres faites en union avec Dieu ». Mais le grec est beaucoup plus essentiel. Il dit « ses œuvres faites en Dieu ». Exactement comme la vie de Jésus, depuis sa naissance, au début de sa mission messianique, jusqu’à l’accomplissement du sacrifice et à la résurrection – toute la vie de Jésus est une vie en Dieu, une vie dans la volonté de Dieu.

Jean utilise aussi cette formule extraordinaire : « faire la vérité ». Que signifie faire la vérité ? Jean a une relation riche et complexe avec la vérité. Nous nous souvenons de la question que Pilate pose à Jésus : « Qu’est-ce que la vérité ? » [Jn 18:38]. On le sait, Jésus ne répond pas à la question de Pilate. Le passage d’aujourd’hui clarifie ce silence. Jésus dit que ceux qui font la vérité agissent en Dieu. La vérité n’est donc pas une notion abstraite. La vérité est plutôt un état : être sous la lumière du Fils de Dieu, être le destinataire du sacrifice de l’Agneau. On ne donne pas une définition de la vérité : plutôt, on vit la vérité – on fait la vérité en vivant en Dieu, à la lumière du sacrifice du Fils de Dieu.

Sur ce train de pensées on peut se demander si ce sacrifice ne pouvait pas être évité. Si Dieu est toutpuissant, ne pouvait-Il pas octroyer la vie éternelle sans sacrifier son Fils ? Pourquoi faire souffrir le Fils de Dieu autant ?

Car le sacrifice que Dieu fait pour nous est l’expression de l’amour de Dieu pour nous. « Dieu a tellement aimé le monde, qu’Il a donné son Fils unique ». Dieu a rendu Agneau sacrificiel ce que Dieu chérit le plus [Jn 1:32], comme preuve d’amour vers le monde, vers la création, vers l’humanité. Le sacrifice de Jésus est donc le suprême acte d’amour que Dieu puisse faire envers nous.

Cela confirme la nature paradoxale du sacrifice divin. Ce sacrifice est paradoxal car c’est une action de Dieu envers nous, et non pas une action de nous envers Dieu. Ce paradoxe signifie que Dieu prend l’initiative, que Dieu vient vers nous avec ce sacrifice. Donc, la vie éternelle, le but du sacrifice, est donnée avant tout ce que nous pouvons faire pour la mériter. La vie éternelle est un don, qui est révélé dans la mission messianique de Jésus, dans son sacrifice et sa résurrection – un mystère que nous ne pouvons même pas embrasser avec notre esprit. Voilà pourquoi le sacrifice du Fils est un geste d’amour : il est injustifié, il ne suit rien, il précède tout.

Tout cela est présent dans chaque culte, au moment du passage de la confession du péché à l’annonce de la grâce. Que signifie-t-il ce passage ? Parfait il peut apparaitre un peu automatique, comme s’il suffit de confesser les péchés pour être pardonnés et sauvés. En réalité les choses sont renversées : nous pouvons annoncer et recevoir la grâce car la grâce est déjà là – déjà octroyée grâce au sacrifice et à la résurrection de l’Agneau de Dieu. Donc, ce n’est pas que nous confessons nos péchés et donc la grâce est annoncée. Plutôt, le sacrifice de Jésus a eu lieu, la Parole a été faite chair, elle est morte sur la croix et elle est ressuscitée, et grâce à cela, grâce à cette lumière du Fils de Dieu, nous savons de nos péchés et nous pouvons les confesser. Ce n’est pas que nous nous savons pécheurs et donc nous prions Dieu de nous pardonner. Plutôt, nous regardons vers la Croix – tout comme les israélites voyaient vers le serpent de bronze –, nous voyons l’Agneau de Dieu élevé sur la Croix, nous croyons dans le Fils de Dieu, et grâce à cela nous nous savons sauvés, et nous nous savons pécheurs. L’ordre est renversé. Ce ne sont pas nos péchés à avoir la priorité sur la volonté de Dieu de sacrifier son Fils. Au contraire, c’est la volonté de Dieu de nous manifester son amour par ce sacrifice à avoir la priorité sur notre conscience de pécheurs. Et cela, à chaque passage « confession des péchés – annonce de la grâce ».

Voilà donc comment la conversation nocturne entre Jésus et Nicodème nous prépare aux célébrations de Pâques. Cette conversation nous montre d’une manière profonde que chaque culte de l’année est un écho de Pâques. Dans chaque culte nous célébrons l’amour de Dieu pour nous – amour qui s’exprime par le sacrifice du Fils de Dieu. Et donc chaque culte est un symbole de Pâques. Chaque culte nous prépare au mystère sublime de Pâques.

Amen.

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